Selon une étude conjointe en sciences de la communication et en statistiques, les accidents de la route seraient plus meurtriers lorsqu’ils impliquent une femme au volant. Une conclusion qui ne repose pas sur des compétences de conduite, mais sur les effets délétères du sexisme ordinaire.
Comment expliquer ce différentiel genré ? Les auteurs de l’étude l’attribuent à une indulgence excessive de la part des conducteurs masculins, qui, en croisant une femme au volant, tendent à minimiser les risques. Une forme de galanterie routière qui, paradoxalement, aggrave les dangers.
La femme au volant serait ainsi moins prise au sérieux : « Par réflexe culturel, les hommes cèdent plus volontiers la priorité à une conductrice qu’à un conducteur, même lorsque leur propre sécurité est compromise », souligne l’étude. Les comportements les plus marqués seraient observés chez les conducteurs issus de cultures méditerranéennes — Italiens, Portugais, Espagnols et Maghrébins notamment.
Pour tester leur hypothèse, les chercheurs ont observé une dizaine de conducteurs masculins, sans leur révéler la nature exacte de l’expérience. Leur perception du risque semblait altérée dès lors qu’ils identifiaient une femme au volant. « Une femme, ça met une éternité à faire un créneau. Alors oui, je laisse passer », témoigne l’un d’eux, illustrant le stéréotype à l’œuvre.
Mais cette courtoisie involontaire peut s’avérer contre-productive. « Face à une priorité inattendue, certaines conductrices perdent leurs repères : le levier de vitesse, les pédales, tout devient confus. Elles caleraient, puis réaccéléreraient brusquement, augmentant le risque de collision », note un chercheur. En croisant ces observations avec les données historiques des accidents mortels depuis 1974, les résultats sont saisissants : « En France, sur les 50 accidents de la route les plus meurtriers, 47 impliquent une conductrice ». Une statistique qui interroge davantage les biais cognitifs que les compétences mécaniques.
F. Dupont | l'Immunité.fr
Francis Dupont est ingénieur agronome de formation, diplômé de l'Institut national agronomique Paris-Grignon. Il est également spécialiste dans les études statistiques et les études de marché.